Quatre infirmières suédoises en déplacement © Laurence Baeke

Quatre infirmières suédoises en déplacement © Laurence Baeke

Après un premier travail plutôt remarqué lors de sa présentation au Festival Impatience l’année dernière (Pourquoi Eve vient-elle chez Adam ce soir ?), le collectif Ubik Group était à Nancy pour présenter sa dernière création, Quatre infirmières suédoises en déplacement — en première française — dans le cadre du Festival RING. Un projet composite qui peine malheureusement quelque peu à prendre forme.

Création au présent

Les infirmières suédoises, ici, sont les membres du collectif. Le déplacement, c’est celui vers la ville qui les accueille, et qui leur sert de terrain de jeu pendant quelques jours afin de construire un spectacle à partir de celle-ci — en en observant l’esprit, l’ambiance, la population, l’architecture —  et afin de se confronter à chaque fois, devant un matériau nouveau, aux difficultés que représente la construction d’un récit, avec ses incertitudes, ses flottements, ses contradictions. Un travail audacieux, duquel nait un spectacle surprenant, à l’humour souvent efficace, mais malheureusement un peu convenu et parfois déroutant.

S’appuyant sur un jeu d’acteur simplifié, des projections et des enregistrements sonores, le collectif Ubik Group s’attelle donc à explorer et à questionner les mécanismes de la narration, avec plus ou moins de réussite. Entre imprécisions et longueurs (une deuxième partie qui laissa les spectateurs parfaitement circonspects), les membres du groupe peinent souvent à maintenir l’attention de la salle et à développer leur réflexion, qui reste d’ailleurs incertaine au moment où se rallument les lumières. 

Diagnostic en surface

Car si le regard porté sur la ville et les anecdotes glanées çà et là au cours du déplacement font souvent mouche auprès du public local, on se questionne cependant sur leur intérêt dramatique véritable, puisque que celles-ci ne provoquent finalement que très peu la réflexion sur l’environnement décrit. Empilement de cartes difficilement lisibles, photographies de rues vieillissantes ou d’habitants mal fagotés, témoignages parlant de la météo : chaque élément semble présenté dans le but de faire rire (ce qui réussit bien par moments), et on ne cesse alors de chercher ce que veut réellement nous raconter, entre les ricanements, ce collectif composé de français, belges, suédois et polonais, et dont l’intention semblait pourtant être de questionner la nouvelle organisation des lieux de vie dans l’Europe d’aujourd’hui, et l’impact de la subjectivité sur la façon dont s’écrit l’histoire.

Malgré quelques moments forts — comme ce témoignage d’un habitant du quartier du Haut-du-Lièvre, une cité-dortoir perchée sur les hauteurs de la ville comme si on avait voulu la tenir à distance, qui nous décrit avec tendresse son sentiment de mise à l’écart et son désir de rapprocher son quartier à sa ville — quelque chose manque à cette création, et un sentiment amer d’incomplet persiste. Il est bien dommage que la dimension politique de ces Quatre infirmières suédoises en déplacement se retrouve, par trop souvent, effacée par les artifices et les détails anecdotiques.