I/O n°69 [édito] : Tout ce qui est nous tue

Du passé de cette saison dernière faisons table rase, car ce qui est nous tue, et entamons alors celle qui vient avec l’élan de la croyance en un futur meilleur. Celle qui vient, c’est pour nous, pour I/O Gazette, celle qui débute avec Charleroi danse, loin des terres avignonnaises qui nous ont vu naître, donc loin du confort et des certitudes. Loin de la pensée, aussi. Celle qui empêche quand les circonlocutions des mots étouffent les gorges des artistes, seules capables d’avaler les tristesses du monde. Le mouvement, alors. Car bien avant la pensées et les phrases, c’est par lui que la vie commence, s’installe, recommence et se dégage de l’infernal éternel retour nietzschéen. La danse, comme une évidence et pour assurance de notre survie, donc. Celle, furieuse et vitale de La Horde, mais aussi celle, gracieuse et cérébrale de Lucinda Childs. Pour s’échapper, conscient et sans oublier, car plus que le cerveau, le corps qui danse est évidemment le lieu de tous les souvenirs… la seule partie de nous qui toujours se souviendra de ce que nous aurons été. La seule aussi, qui toujours fera fi de notre incapacité à retenir les leçons de l’histoire à l’heure de devoir affronter le désastre. Ce même désastre qui « a peur des groupes », comme le dit si bien Vincent Macaigne cette semaine sur la scène de sa dernière création. C’est donc bien cela, que nous célébrons ici : un festival rempart face au désastre. Un moment d’unité pour persuader les sceptiques que malgré « la chaleur de la ruine qui coule dans nos veines » et les souvenirs d’une saison dernière inoubliable, « l’avenir est à nous ».