Jouer ou ne pas jouer ? Telle est (toujours) la question

Un jour j’ai rêvé d’être toi

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Le motif du « théâtre dans le théâtre » est aussi vieux que le théâtre lui-même. De Shakespeare à Ivo van Hove, l’idée de mettre en scène le processus de travail, de présenter les aléas de la création, de mettre en évidence le personnage qui est l’acteur a obsédé (presque) tous les créateurs à un moment de leur carrière. Le travail de la compagnie Shindô, « Un jour j’ai rêvé de toi », est aussi hanté par cette même problématique : deux acteurs, Ange et Bert, philosophent sur leur profession, sur la vie, sur le double et le déguisement, sur le désir de devenir un autre. Les mises en abyme se multiplient. Ange et Bert deviennent Anaïs et Bertrand, les « vrais » comédiens. Ils balancent les noms des directeurs et d’acteurs devenus classiques : Thomas Ostermeier, Valérie Dréville, même la Huppert. En nous adressant la parole, les deux créateurs nous confient l’origine de leur pièce, leur source d’inspiration (un film de Paul Vecchiali, « Femmes femmes » mais, hélas, ils n’ont pas eu les droits). Ils nous parlent du narcissisme de l’acteur, du manque de reconnaissance, mais – ils nous l’annoncent – pas dans un sens didactique.

Jusqu’ici, rien de nouveau. La pièce de la compagnie Shindô répète les mêmes techniques, les mêmes jeux scéniques de la mise en abyme : la reprise du texte, la mise en question de la fiction. Par moments, le rythme devient pénible, ainsi que les dialogues. Nous ne savons plus si ce qui se passe sur scène est « vrai » ou pas. S’ils jouent ou pas. Si ce dialogue est naturel ou pas. À la fin, peu importe. C’est du déjà-vu. Et voilà peut-être le mérite de ce travail. Car dans cette simplicité thématique, entourés d’une scénographie minimaliste, les deux comédiens réussissent par moments à nous intéresser, à provoquer des réflexions sur l’art du théâtre et son rapport avec l’altérité. Malgré le manque d’originalité du propos, il y a quelque chose de subtil qui envahit l’espace scénique et nous plonge dans une atmosphère particulière, qui nous invite – encore – à nous interroger sur les questions éternelles du théâtre.