Dans la vie, quand on n’attend rien, c’est peut-être qu’on est comblé ; mais le plus souvent c’est qu’on est triste, qu’on a renoncé, capitulé, qu’on a accepté que c’était la fin et qu’on n’y changera rien. On ne sait pas très bien de quelle fin il s’agit, ni si vraiment elle nous concerne, mais on est juste épuisé, vidé de notre courage, vidé de nos idées et on a peut-être simplement envie que tout s’arrête. Bref, on n’attend plus rien.
Alors que si on se souvient bien de l’attente de l’enfance, c’est celle qui attend tout, veut tout, là et tout de suite. Elle est vorace, pugnace, arrogante. L’a-t-on apprivoisée ? Peut-elle être domptée ? Comment l’a-t-on gardée précieusement ? Où est-elle abritée, cette petite voix intérieure qui veut changer le monde, croire en l’amour et l’amitié, ne voir que les alternatives et fraterniser même si parfois on est trahi ?
Si on a grandi sans cesser de l’entendre, c’est qu’on a pu la faire muer en attente/risque/désir/curiosité. On a su lui donner du temps, la sortir de l’impatience de l’enfance. Cette petite voix, on l’a nourrie d’imaginaire et d’affection. On a eu des silences pour l’écouter encore dans le chaos du monde. On sait alors que la vérité est aussi dans la fiction. Et qu’il n’y a plus à attendre pour se faire confiance.
Le théâtre pour moi a été un monde où abriter ma petite voix. Même si au théâtre, c’est sans doute un peu différent que dans le monde, il ne faut s’attendre à rien pour que tout puisse advenir.