© Alain Monot

Abigail Fowler a choisi de laisser commencer la nouvelle création de Volmir Cordeiro la lumière allumée dans le public, rehaussant le tout par des néons à la lumière crue tant sur la scène que dans la salle. Tout de suite, cela créé un climat, fixe l’image, très moderne, industrielle, saturée comme celle des grandes villes. Volmir Cordeiro surgit de là, seul, jupe noire plissée, tee shirt gris sans manche soyeux comme du velours. Son teint pâle dans ces lumières s’accentue et met tout de suite dans l’ambiance du reste du spectacle à la fois étrange et bienveillant.

Le danseur – chorégraphe, seul en scène, se frotte les mains et fait comprendre au public de le suivre, ce qu’il fait assez vite. Volmir Cordeiro use de ce geste, puis du fait de passer ses mains chauffées sur ses yeux pour provoquer une émotion et créer les conditions d’une image qui ne peut que nous toucher… Une femme fait son entrée, reprenant le signe du pouce et de l’index fait par le premier danseur et ils se lancent dans un duo endiablé, très dynamique qui captive l’attention. De cette effrayante bouche ouverte Volmir Cordeiro créé le premier malaise de la soirée par cette seule figure. Le troisième danseur surgit. Le trio va se lancer dans une danse de gestes et de mots entre danse tribale et danse de guerre. Le quatuor est au complet lorsque la danse des mains frottées reprend. Un rapide retour aux cinq sens nous saisit et c’est le cri de cet enfant qui nous sort de notre songe. Il précédera celui de l’eau qui lave, qui purifie et dont se sert une des danseusse pour un solo. Volmir Cordeiro fera son retour en short noir et tee-shirt violet qui accentue son incroyable présence. La folie s’empare des danseurs qui l’un après l’autre vont nous montrer leur parties génitales juste pour dire combien ils osent nous défier tout en ne cherchant pas à nous provoquer. Est-ce utile ? Sans doute rappeler que l’Homme est un loup pour l’Homme permet à Volmir Cordeiro de déployer tout le spectre de ces interrogations.

La séquence anthropophagique insiste lourdement et dure plus que de raison, petit reproche d’ailleurs valable pour tout le spectacle qui installe trop longtemps encore des situations sur lesquelles il faudrait savoir passer. Et ce n’est pas la séquence de « je veux vomir sur scène » qui nous rassurera sur le sujet. Heureusement, elle précède une séquence entre les deux danseuses qui jouent avec des œufs qu’elles vont finir, comme il fallait s’y attendre, par casser sur la scène en un geste précis qui ne doit rien au hasard. Dans ce travail, Volmir Cordeiro arrive difficilement à faire oublier les images de sa marraine en danse Lia Rodrigues. Il lui reste encore un long chemin à faire pour atteindre cette plénitude acquise chèrement par l’inégalée brésilienne qui a influencé tant de danseurs dans son pays. La pièce tient beaucoup à la présence des danseurs et particulièrement Volmir Cordeiro qui confirme par cette pièce sa capacité à subjuguer l’auditoire. Néanmoins, on ressent que trop de choses restent encore plaquées là où il faudrait plus de spontanéité… mais comme on dit, on a l’âge de ses artères et Volmir Cordeiro a tout juste trente ans… il lui reste assez de temps et sans doute suffisamment de talent pour parvenir à développer ses idées dans des spectacles qui ne manqueront pas de susciter l’intérêt.