Dès l’interpellation sur le trottoir par un homme poilu en slip blanc, chauve, il apparaît que « Buffle ! » ne sera pas un moment anodin.
Trois beaux gosses, affirmatifs et incertains comme le sont si souvent les post-ados de ces temps de mutation, nous déversent leurs humours alternatifs et leurs spleens écossais, en en oubliant parfois les maux descriptifs de leurs états sentimentaux.
Des bonnes idées, du rire, une énergie souvent déjantée ne pallient pas toujours une direction scénographique titubante : le spectateur pourtant séduit est parfois perdu par les alternances de franches rigolades avec des mots dignes de l’obscurité de Lautréamont.
Côté passif, une sonorisation trop forte non seulement ne sert pas les voix mais peut même les dissimuler. Dommage, les timbres sont chauds, virils et intéressants, souvent plus proches d’un gospel contemporain. Point besoin de béquilles technologiques que diable en ces cas-là !
Ce patchwork intègre aussi quelques moments de vraie grâce, comme la saynète de « l’homme sur le quai » : une poésie lumineuse sur le lien entre la solitude de celui qui reste et l’égoïsme de ceux qui partent.
On retrouvera ainsi l’esprit de « La Solitude », de Ferré, disséminé dans plusieurs trouvailles surgissant au détour d’un couplet sur le nomade ou sur le politique.
Au global, ces trois anges finiront en slip, la tête arrosée sur une reprise de Tom Waits ; on sent bien que cet abreuvement ne sera que de peu d’utilité pour recouvrir une calvitie naissante et rigolote, mais que grâce à lui les idées pourront continuer à fleurir dans ce cerveau collectif tourmenté mais parfois si joli.
Comme Giacometti le prôna toute son existence, « Émondez, taillez, enlevez, la réponse est dans le moins ».