Techno-cocon

Pillow Talk

© Ruben Van De Ven

Sur la grande scène des Amandiers, une mer sombre d’où émergent des formes abstraites, comme autant de corps engloutis. Un oreiller futuriste est déposé sur chacune d’entre elles : les spectateurs, qui entrent en silence et un par un dans l’espace, sont invités à y reposer leur tête et à s’allonger. Le « Pillow Talk » – littéralement « conversation sur l’oreiller » – peut démarrer, sauf que l’interlocuteur est une intelligence artificielle. La conversation prend des atours beaucoup plus épineux : peut-on se confier à un ordinateur ? Quelle émotion se libère, quelle autre se frustre ? Personne n’entendra ce qui est dit : c’est un petit cadeau que Begüm Erciyas offre au visiteur égaré. Si le dispositif de « Pillow Talk » est épatant par sa délicate scénographie autant que pour l’idée dystopique d’être réconforté par un robot, il reste pourtant confronté à un problème : les intelligences artificielles ne sont pas totalement au point ; difficile d’engager un vrai échange. D’où une certaine frustration : l’installation reste un peu précaire pour des raisons scientifiques et économiques plus qu’artistiques. En filigrane, elle souligne peut-être notre a priori fantasmatique de la technologie : une chose est sûre, on n’est pas encore dans « Her ».