C’est une proposition scénique qui nécessite pour y accéder sereinement un certain nombre de prérequis. Tout d’abord, avoir une sensibilité particulièrement marquée pour l’esthétique néo-baroque. Tout sur le plateau est gorgé d’exubérance ; lumières arc-en-ciel et pyrotechnies à gogo, décor antique en carton-pâte, jeu des acteurs appuyé et petites blagues pour faire passer les actes, c’est un moment de fanfare à paillettes que propose Omar Porras. Le metteur en scène choisit comme prétexte à ces fastes de monter une pièce méconnue de Molière, « Amour et Psyché », qui résonne ici étrangement comme un conte à mi-chemin entre « La Belle et la Bête » et « Cendrillon » (avec un petit clin d’oeil rose bonbon à “La Petite Sirène” via la chevelure enchantée de Psyché…) Dans sa façon de surligner l’ensemble et d’aller chercher le public par le rire et les tours de passe-passe, il y a une parenté évidente avec le monde parallèle de Disneyland. Comme si le théâtre avait ici le pouvoir nous endormir et d’amoindrir par des kilos de barbes à papa les coups portés par le monde réel. Alors, même si ce n’est pas ce que nous défendons, ne tombons pas dans le travers facile du démontage systématique du “théâtre divertissement” car il est difficile de ne pas constater que le (grand) public, lui, est ravi de la fable et en a pour son argent. Certes, rien ne le poussera à s’interroger sur le débat qui agite les cercles de chercheurs à savoir si la figure de Psyché tient plus de l’allégorie que du mythe mais peut-être qu’inconsciemment Porras y apporte sa réponse : elle est allégorie, mais lorsque le récit déborde de l’image, elle entre dans l’univers du mythe.