© Pierre Planchenault

Il y a quelque temps, Hamid Ben Mahi, sous la direction de Michel Schweizer, s’était emparé d’un micro pour ancrer la danse hip-hop, dont il est un talentueux représentant, dans une histoire chorégraphique et intime. La voix et les mouvements du danseur s’effacent dans “Royaume” pour laisser place à six danseuses. Si ces dernières portent toutes en elles les stigmates d’une condition féminine trop souvent bafouée, elles réussissent à s’affranchir par la danse des limites imposées par la condition masculine. Ces femmes au plateau, dans leur singularité et leur individualité, créent un espace qui leur est propre mais qui accueille aussi les voix de toutes celles que l’on n’entend pas. La rage de leur danse, qui prend sa source dans le hip-hop, accompagne une parole qui, alors que les corps font une pause, prend le relais. L’engagement des danseuses efface toutes les réserves que l’on aurait pu avoir sur un travail que d’aucuns, saturés de danse et de performances plus ou moins hasardeuses, ont pu qualifier de « déjà vu ». Certes Hamid Ben Mahi emprunte des chemins que d’autres avant lui ont battus, mais il le fait avec cette spontanéité, cette fraîcheur et cette énergie qu’on lui connaît et qu’il a su parfaitement transmettre à ses six interprètes dont le travail, puissant et sauvage, ne peut qu’emporter notre adhésion. À la violence de notre monde, Hamid Ben Mahi oppose un royaume où la Femme et la Beauté règnent en maîtresses.