De l’autre côté du miroir

Z'Ombres

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Marcel Proust n’est certainement pas le seul artiste à se questionner sur le temps. Parmi les penseurs de la-course-des-aiguilles, on comptera également Isabelle Pirot, à l’origine de la trame narrative de la pièce, mais aussi incarnation sur scène de la « moi-vieillie ».

17 h 25. La salle se plonge dans le noir, on n’entend plus que le doux bruissement des rideaux qui se lèvent. La voix off résonnant dans l’obscurité précipite le spectateur dans ce chant de l’Ombre. Lorsque la lumière des projecteurs inonde de nouveau les planches : deux femmes, la même, à deux âges différents ; deux femmes qui s’interrogent sur l’inévitabilité de la sénescence, dans un dialogue solitaire.

Le choix de la mise en scène (Aurore Frémont) rend compte de cette esthétique du double. Les ombres – au pluriel, comme l’indique le titre – prennent possession de la totalité de l’espace scénique, tantôt projetées sur les murs ou derrière les deux pans de rideau, par un jeu de lumière parfait, tantôt matérialisées par une diction de l’écho, les cris de la Jeunesse et de la Vieillesse, allégorisées, déchirant le silence à l’unisson.

Il arrive aussi que le double devienne antinomie. Pas une antinomie fond/forme, non. Une antinomie fond/fond. Si la pièce se présente comme un éloge de la vieillesse, elle met pourtant en scène l’angoisse de la dégradation du moi, dégradation incarnée par le personnage d’I. Pirot, gagné par une perte progressive de la mémoire.

Mettre en scène la fuite du temps n’est certainement pas chose facile, une petite heure seulement, pour rendre compte de l’immuabilité et de l’aspect éphémère de la vie. Pourtant, seul léger bémol : la pièce traîne – paradoxalement – parfois en longueur.