Si on donnait la parole aux mots, qu’auraient-ils à nous raconter ? C’est l’exercice auquel s’est plié Matei Visniec dans « Moi, le mot ». Trois comédiens sur scène en interprètent plus de vingt sur la soixantaine décortiqués dans le texte de Visniec.
Après un début très réussi sur « le mangeur de mots », sortes d’aspirations sonores des mots qui nous échappent par moments, et quelques démonstrations plus que concluantes sur des mots comme « langue » et « bouche » vus comme des frères ennemis dans une danse des corps ; « oui » et « non », sublimés par les différentes façons de dire « oui » à un mariage ; « l’utopie », imaginée comme un banquet qui finit mal, mais aussi « pute », porté par le seul comédien masculin, la dimension politique présente dans l’écriture de Visniec n’est, elle aussi, pas oubliée ; d’autres mots ont eu du mal à me transporter. Sont-ce les choix de mise en scène parfois trop consensuels et attendus (une femme en ombres chinoises qui se dénude pour signifier la féminité) qui m’ont maintenu de temps en temps à l’écart ? Il y a un peu de slam, un peu de violoncelle, pas mal de chants mais, à mes yeux, pas assez de création scénique originale. On se délecte quand même du texte de Visniec, totalement savoureux dans cet exercice de personnification.
Et il faut aussi souligner le jeu des comédiens, qui ne quittent pas la scène et qui, en étant totalement différents, forment à eux trois une vraie force et dégagent une immense énergie. Les rires ont souvent éclaté dans la salle, notamment grâce au potentiel d’Aurélien Vacher. Un acteur qui utilise avec talent chaque aspect de son corps comme support comique, puisqu’il lui suffisait de rouler les yeux pour provoquer l’hilarité générale. À suivre, donc !