La performance au service du féminisme

Les Contre-archives

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Il ne fallait pas avoir le vertige pour grimper l’escalier branlant qui mène au studio de répétition du Point éphémère ce vendredi soir. Mais ce qu’on y a vu méritait bien quelques acrobaties. Le Laboratoire de la contre-performance présentait, sous une forme courte (une vingtaine de minutes), ses contre-archives. Qu’est-ce qu’une contre-performance ? Une contre-performance, c’est un moyen de questionner tout en se le réappropriant un geste artistique largement dominé par les hommes.

Dans un dispositif de séminaire d’entreprise, diapositives projetées sur un écran et paperboard à l’appui, trois femmes proposent une introduction à la performance féminine et féministe. La contre-performance, c’est aussi ça : prendre le contre-pied de ce que le public est en droit d’attendre lorsque le mot « performance » est employé en gommant l’aspect événementiel pour le replacer dans une performance à connotation managériale.

La dénonciation (car il s’agit bien, ici, de dénonciation) est forte et symboliquement chargée : vêtues de noir, privées de parole, les trois performeuses sont réduites au statut d’hôtesses tandis que des voix féminines dissidentes se fraient un chemin via un petit magnétophone à cassettes. La seule parole directe qu’on entendra sera prononcée cachée derrière une barbe orange, soulignant l’artifice, voire l’imposture, mais aussi l’impossibilité de prise de parole par les femmes dans un milieu où on leur laisse peu de place, celui de l’histoire de l’art. Il est d’ailleurs intéressant de relever que non seulement les contre-archives présentées sont des objets traditionnellement dévolus aux femmes ou aux enfants (ciseaux à bouts ronds, rouleau à pâtisserie), mais qu’elles sont également à la taille d’objets de poupée, rappelant que l’image de la femme est l’image d’un être frêle, l’« angel in the house » tel que théorisé par Virginia Woolf dans l’Angleterre post-victorienne.