Yoann Bourgeois : questions d’équilibre

Tentatives d'approches d'un point de suspension

(c) Yoann Bourgeois

(c) Yoann Bourgeois

« Tentatives… » est la collection d’œuvres diverses de Yoann Bourgeois, dont quatre ont été sélectionnées pour mettre en scène, dans le lieu magique du théâtre du Vieux Saint-Étienne de Rennes, église du xiie siècle reconvertie en théâtre en 1989, un moment déambulatoire hors du temps, autour de saynètes poétiques sur fond de musiques et textes lus par les performeurs.

La plus minimaliste des quatre pièces, « Escalier » (aussi intitulé « Fugue/Trampoline »), est l’ascension d’un homme, sans cesse contrariée, sans cesse réitérée. Comme dans le spectacle « Celui qui tombe », on trouve ici un équilibre délicat entre deux modalités d’être, avec la chute considérée non pas comme un drame mais comme un lâcher-prise. Également interprété par Yoann Bourgeois, « Autoportrait » est une déclinaison du « Noustube », immense cylindre rempli d’eau inventé par le circassien allemand Jörg Müller : le texte d’Édouard Levé (à (re)lire chez P.O.L), inspiré par « Je me souviens », de Perec, dresse le portrait d’un homme en une série de courtes affirmations ; des mots simples et justes dont la force est décuplée par les mouvements subaquatiques de ce corps plongé dans une autre dimension de l’espace-temps.

« Dialogue » et « Fugue/Table », proposant tous deux l’habitation d’une scène miniature en bois, offrent deux variantes d’un dialogue amoureux dont ils explorent la fragilité. Le premier, créé pour le festival, s’appuie sur un sol en équilibre, autour d’un pivot central. Chaque infime déplacement de l’un ou l’autre membre du couple (Estelle Clément-Béalem et Raphaël Defour) a une répercussion immédiate, obligeant les protagonistes à une précision redoutable. Dommage que, sur ce numéro, les voix, très sous-mixées, ne se laissent pas davantage entendre. Quant au plateau tournant de la seconde pièce, sur fond du langoureux et triste morceau « Wild Is the Wind » de Nina Simone, il est fascinant du début à la fin : Yoann Bourgeois et Neta Oren s’entrechoquent (la séquence autour de la table évoque le travail récent de la compagnie Barks), s’esquivent et courent à perdre haleine à la recherche de l’Autre.