Rebecca Saunders : Yes

Rebecca Saunders : Yes

(c) Franck Ferville

Saint-Eustache avait des allures de navette spatiale. La nef éclairée par des lampes bleu aéroport jouait toujours plus à ressembler au fond de cale d’un navire en partance. Vertige de cet espace miroir architectonique résonnant à l’identique dans cette musique chuchotée, murmurée. Joyce, l’auteur des mots susurrés, est un écrivain du voyage. L’incantation de ses mots dans cet espace immense entraînait l’esprit dans une dérive poétique individuée. L’incapacité généralisée à la compréhension de leur signification, comme ces signaux de l’espace trop faibles et trop confus pour que l’on n’entende pas autre chose que le chant des étoiles, conférait à ce moment un air de communion avec des voix angéliques venues du fond des cieux. De l’ennui aussi, mais de ces ennuis qui vous donnent une liberté de se laisser emmener. De lâcher prise. De s’abandonner à cette matrice sonore, sculpture dont la structure complexe est propice à l’errance.