@ Acatel

Dans l’univers fantasque du mentalisme, le spectre est large, jusqu’à atteindre les prouesses épiques d’un David Blaine ou d’un Derren Brown. Et puis il y a les petites formes scéniques qui empruntent les chemins de traverse, délaissant la pure performativité des shows anglosaxons pour explorer la dimension poétique de la magie. Kurt Demey part de la synchronicité métronomique (phénomène toujours intrigant pour le profane) et des lucioles pour poser quelques interrogations métaphysiques sur le hasard et la nécessité : le hasard n’est-il qu’un phénomène dont on ne comprend pas la cause ? Aidé de Cédric Orain à la mise en scène, Demey s’appuie sur une scénographie claire-obscure, un théâtre d’objets et de sable et un écrin sonore – hypnotique accompagnement à la contrebasse par le pince-sans-rire Joris Vanvinckenroye, et séquence finale à la scie musicale. Il joue, comme on s’attend d’un mentaliste, sur les interactions avec un public curieux de voir où l’aventure va le mener, en proposant une expérience collective dont la résolution s’avérera, bien entendu, bluffante. Mais ce n’est pas uniquement le succès attendu d’une expérience d’illusionnisme dont on peut deviner, partiellement, les ficelles manipulatoires, qui fait le sel du spectacle dont le titre porte la fructueuse ambiguïté. La suspension temporaire de crédulité, celle d’un regard venu de l’enfance qui substitue aux probabilités mathématiques et au constructivisme froid un enchantement de la réalité, n’est pas qu’un refuge évasif : c’est aussi un rapport plus joyeux au monde.