« Mon amour fou » va éclairer les couloirs sombres où les âmes éperdues viennent se tordre, où le noir est source de beauté tout autant que de puissance et de souffrance.
Quand l’être aimé déclare une affection cognitive (bizarre comme le mot « affection » résonne tant de son propre affect que de celui d’être affecté…), l’aimant se retrouve face à un miroir, celui de ses peurs et de ses chimères. Sauver, aider, toutes les illusions surgissent pour un parcours dont la douleur va crescendo au fur et à mesure de l’abandon des croyances en sa propre toute-puissance.
Accompagner un bipolaire comme Roxane Kasperski est d’abord un exercice d’humilité : je me découvre ni fort, ni malin, ni calme, ni aimant. Mis à nu, violenté par l’absurde des situations, sans reconnaissance de l’être aimé, obligé d’inventer sans cesse des langages et réflexes nouveaux, de retenir sa panique jusqu’à l’asphyxie.
Solitude. Peur. Absence de compréhension des tiers. Absurdité inhumaine des réactions de certains praticiens médicaux. Faux conseils et vraies bonnes intentions. L’Insupportable : ce que l’on ne peut porter.
Mais l’amour sauve, c’est-à-dire s’aimer soi, fuir les demandes inouïes et les reproches générés par les paranoïas grandissantes du malade.
Et un jour, partir pour sauver ce qu’il reste de cet amour, grandi, les deux pieds par terre, détruit aussi, enfermé dans cette boucle sans fin du « Je suis parti pour être » et du « Je l’ai abandonné, je veux retrouver cet être de lumière ».
Un jour, cette destruction parfaite amène sur les planches. Dire, conter, comprendre. C’est ce que Roxane Kasperski nous a offert.
« Mon amour fou » est la pièce qui longtemps va éclairer les couloirs sombres où les âmes éperdues viennent se tordre, où le noir est source de beauté tout autant que de puissance et de souffrance, où la mue au sens propre du terme, y laisser sa peau, la mue donc est achevée par la force de l’esprit et la chaleur de cet amour.