(c) Ariane Catton

On pourra chercher longtemps ces familles heureuses qui le seraient toutes de la même manière : la vérité est que chaque famille est dysfonctionnelle à sa façon. Les Keller, par exemple, sont encore en train de sécher les larmes de deuil du père que, à l’occasion de l’anniversaire de la mère, les cœurs se fendent et les bouches se délient. Là où le projet aurait pu s’arrêter aux poncifs psychologiques et narratifs du genre – qu’il n’évite pas tout à fait -, la bonne idée est d’avoir adjoint au trio de comédiens un beatboxer au sommet de son art : ce dernier ne vient pas seulement doublonner l’action, tel les bandes sonores superfétatoires dont abuse le mauvais cinéma, mais il en devient la révélation expressionniste et comique, dans des effets de synchronisation au cordeau. L’histoire, convenue, n’a finalement que peu d’importance ; elle s’efface au profit de la vie intérieure des personnages, dévoilée par des insertions interrompant le déroulé linéaire pour mieux y revenir en y adjoignant une nouvelle couche de réalité. Tout en causticité, habité par un jeu chorégraphique burlesque et poétique, « La poésie de l’échec » est spectacle feel good pour se réconcilier avec les irréductibles points aveugles de nos trames familiales.