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On accuse souvent le théâtre de profaner les miracles du cinéma : l’adaptation d’un roman dérobe toujours aux lecteur.rice.s un imaginaire incessible, celle d’un film se doit a contrario de trahir les images premières, de les abimer au risque d’être taxé de pâle copie. Reconnaissons alors une (unique) qualité à cette première adaptation mondiale de “L’Argent de la vieille” : celle d’être parvenue à substituer au film sa propre icône. De fait, le spectacle vaut moins comme comédie que comme documentaire sur les peignoirs chics d’une actrice. Y défilent en effet autant de scènes que de nuances de violets auxquelles s’accordent systématiquement les lueurs de la toile peinte, cosmos symboliquement dominé par le corps de la comtesse. Oublions alors la palpitante ambiguïté du film et son allégorie ambivalente de la lutte des classes : il importe visiblement à Raymond Acquaviva (metteur en scène) et Sylvie Chauvet (adaptatrice) de capitaliser avant tout sur la perfidie toquée de la milliardaire, contre-emploi rêvé pour cette diva sympa qu’est Amanda Lear. Oublions tout finalement de la comédie féroce de Comencini, l’objet scénique ne rêvant pas autre chose que sa grossière mécanisation. C’est donc un boulevard rance qui se joue carte sur tables, montrant des belotes enflammées mais oubliant d’être ludique avec son lot d’actualisations pour chansonniers séniles, ses prénoms écorchés à répétitions, ses douteux tacles physiques, ses cabotinages sans panache, sa playlist « money money » pas très funny, son assemblée de rires gras qui survivent, inexplicablement, devant ce columbarium comique des plus empaillés.