(c) Roan Kane

Après un premier volet très wittgensteinien autour du questionnement métaphysique, Stéphanie Aflalo poursuit ses « Récréations philosophiques » sous une hilarante forme conférencière qui détourne et déconstruit les discours sur l’art.

Les prolégomènes de « L’Amour de l’art » constituent une mise en garde énumérant toutes les façons dont le spectacle pourrait mal se passer à cause des handicaps « rétroversifs » de ses protagonistes : un premier pas de côté qui convoque non seulement l’absurde, mais aussi une forme de retenue fondamentale plaçant le fond au service de la forme. Car, très vite, le cœur du dispositif – décryptage de peintures classiques, de Philippe de Champaigne à Rembrandt, dont les reproductions sont rétroprojetées – est mise à mal par la parodie de cet exercice convenu qu’est le commentaire d’œuvre d’art. Comme dans le court-métrage « Les Photos d’Alix » d’Eustache, le discours se décale du réel et suit ses propres chemins de traverse. A l’académisme de l’exégèse universitaire, nos deux conférenciers opposent les délires interprétatifs et les spéculations hasardeuses – irrésistibles – sur la biographie psychique des artistes. Mais l’extravagance n’est pas confinée à la fausse naïveté et à la déconstruction burlesque du memento mori des peintres. Si Stéphanie Aflalo et Antoine Thiollier sont animés par l’amour du détournement, ils produisent un geste éminemment poétique dans son renversement de perspective qui place les spectateurs en objets du regard. « L’Amour de l’art » est déroutant, ludique, et prodigieusement drôle.