Aux taupes étoilées

Rumeur et petits jours

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Quel plaisir de se laisser entraîner dans l’univers absurde du Raoul collectif ! Car oui, revendiquons-le et cessons de faire semblant, l’entre-soi provoque une jouissance immédiate et libératrice. Se sentir – soi et sa tribu – l’unique destinataire du bon mot provoque un sentiment d’appartenance à une communauté. On se délecte tout aussi goulûment de la dénonciation dudit procédé dans le spectacle ; l’arroseur arrosé, en somme (évitez les premiers rangs, sauf si vous recherchez concrètement les grains de sable qui enraient les machines). Bien sûr, la question du lieu de la représentation change la donne et le regard. Qu’en aurait-il été de l’adhésion au projet si cette proposition avait été présentée dans un cadre moins institutionnel ? Peu importe, seul l’ici et maintenant compte, et ces garçons dans le vent croquent avec verve et splendeur les tics et tocs des penseurs et cultureux. Jamais bêtes ni méchants, nos amis les Belges reconstituent une émission de radio dans une ambiance seventies, soirée diapo et masturbation intellectuelle au programme. Chacun dans un cliché, tous merveilleux de drôlerie et de finesse, ils font vivre en live le plaisir inégalé du débat intellectuel ; le sujet n’a pas d’importance, la joute est l’enjeu premier et la poésie l’arme de la révolte. Même s’il n’est pas certain que les auteurs le vivent ainsi, le propos est ici assez secondaire. Peut-être que l’insertion plus directement politique ne convainc pas pleinement, mais l’ensemble de ces rumeurs de grand soir sont un bijou d’humour intelligent.