"Attends, attends, attends... (Pour mon père)", de Jan Fabre, avec Cédric Charron

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Et dans la brume, un voyageur. Du temps, de l’espace, de la vie. Un voyageur du corps et de l’esprit. Un Dieu ? Non. Un Artiste. L’artiste démiurge qui comprend et qui sait. L’artiste nocher des enfers dont la parole et les gestes deviennent l’embarcation qui nous emmènent, chaque soir, au-delà de cette scène-Achéron, pour nous déposer sur les rives de la mort, espace de sérénité et cimetière du Temps retrouvé offert aux sachants fortunés, aux forçats et aux charmeurs.

Voilà, c’est ça, qui nous est offert en ce moment au Théâtre de La Bastille… Une issue dans nos vies et un voyage à travers nos peurs, guidés par un sorcier, maître de l’Outremonde et portier de l’Outretemps. Cédric Charron ? Jan Fabre ? Jan Charron. Oui, puisque les deux ne font ici plus qu’un et démontrent à merveille l’additionnalité des talents. A Jan Fabre, l’époustouflante gestion de l’espace et des brumes, qui s’épaississent et disparaissent aussi rapidement que nos peines et nos angoisses. Mais pas que ! La beauté des mots, aussi. Des mots brutaux, souvent, et sans poésie, parfois, mais qui déposés à la surface du corps luminescent de Cédric Charron, apparaissent comme un des plus beaux photogrammes de nos vies.

Parce que sans lui, pas de lumière. Le dire. Cédric Charron est un immense artiste performeur. Avec ce corps gracile et décharné, par cette voix profonde et effrayante, il créé et incarne, comme Jan Fabre, l’essence même de l’artiste : cette capacité à faire du ressenti de son passé, l’outil de compréhension du présent de ceux qui vous entourent. Alors c’est beau, tout simplement. Et comme tout ne va pas si mal, ce n’est pas totalement terminé : Jan Fabre sera à La Bastille avec deux autres magnifiques artistes jusqu’au 23 mars.