Les Boréales, festival des cultures nordiques

sans-titre-1

Depuis 1992, les Boréales tissent les liens entre Normandie et cultures nordiques, balte et scandinave, avec cette année deux invités d’honneur : la Finlande et l’Estonie. Organisé par le Centre régional des lettres de Basse-Normandie, le festival est centré sur la littérature mais s’est ouvert au fil des années à la pluridisciplinarité : théâtre, musique, art contemporain, design (saviez-vous que l’Estonie comporte un designer pour 800 habitants ? C’est ce que nous apprend l’exposition « Size Doesn’t Matter » à l’Abbaye aux Dames) et aussi cinéma, conférences ou encore gastronomie. Un programme dense, avec plus de 150 événements dans 32 villes de la région. Côté musique, nous aurons assisté à un joli moment hors du temps avec le concert gratuit de la chanteuse et violoniste Maarja Nuut, qui revisite seule sur scène, à l’aide d’un looper, un répertoire traditionnel estonien à la sauce folk atmosphérique et minimaliste.

Côté scènes, on aura pu retrouver le nouveau spectacle des Suédois du Cirkus Cirkör, « Limits ». Celui-ci aborde la question des frontières réelles ou imaginaires, avec une portée particulièrement politique en ces temps de migrations en souffrance ; une performance ultraphysique, rythmée et poétique qui pâtit toutefois ponctuellement de l’insertion de messages un peu trop démonstratifs. Un moment de grâce fut la reprise du « Julia » de Christiane Jatahy, créé en 2012 : une incontournable adaptation de « Mademoiselle Julie », de Strindberg, à mi-chemin entre cinéma et théâtre (voir notre critique).

Pour ce qui est des créations, la Comédie de Caen accueillait la première du « Livre de Dina », de Lucie Berelowitsch, d’après le best-seller de la Norvégienne Herbjorg Wassmo : un roman-fleuve complexe à adapter, parfois noyé dans un flot de paroles, mais dont l’adaptation sur scène, si elle est encore un peu fraîche, sert la poésie brute du récit, empreinte d’un mysticisme biblique qui s’évapore dans une campagne pleine de neige et d’obscurité… Le choix du dédoublement de Dina (envoûtantes Armande Boulanger et Malya Roman) parvient à rendre avec justesse la complexité de cette héroïne sauvage et passionnée, violente et sensuelle, déchirée par une malédiction de l’enfance.

Au final, les Boréales sont une occasion (en nord) de découvrir des créations septentrionales parfois méconnues, et de rappeler qu’elles ne se résument pas à Björk, Bergman et Stieg Larsson.

Les Boréales, à Caen et en Normandie, du 17 au 27 novembre 2016