L’artiste belge Steven Michel, l’un des bondissants danseurs de « The Dog Days Are Over », la très athlétique pièce du chorégraphe Jan Martens dont il est entre autres le collaborateur depuis de nombreuses années, revêt à nouveau short rétro et tennis de sport et propose au festival Artdanthé une autre performance, où, seul en scène, il surexpose son corps offert comme une matière à l’état brut et se fait véritablement œuvre d’art vivante, telle une sculpture organique et plastique, hybride et hypnotique. On pense aux œuvres de Berlinde De Bruyckere, qui travaille le muscle et la chair crus, émaciés et tendus jusque dans leurs extrémités, en voyant se mouvoir dans d’infimes variations empreintes de lenteur ou au contraire de secousses spasmiques.
La silhouette voûtée de l’interprète se donne à voir tellement pliée et déliée qu’on ne percevra pas sa tête pendant les 40 minutes que dure le solo. Juste un tronc, un dos, des fesses, des bras, des jambes déploient avec une rigueur robotique et répétitive des mouvements d’une raideur sèche, en interaction avec les rythmes et basses puissants d’une bande-son electro hyper vivifiante. Sous un éclairage aux néons colorés de plus en plus dense et saisissant, l’homme parvient un moment à se tenir sur ses jambes et à trouver une précaire stabilité les pieds au sol.
Cela peut évoquer un retour aux origines, une naissance, presque science-fictionnesque, celle d’une nouvelle humanité, fragile, à la découverte de soi et du monde, aussitôt déchue dans le retour quasi immédiat de son représentant à sa condition recroquevillée. La performance témoigne de la recherche personnelle de l’artiste sur l’audiovision et la perception en mettant en scène et en valeur aussi bien la présence physique (qui relève presque de l’exploit, de l’épreuve) que l’espace, le temps, la lumière, le son et les effets cinétiques qui la modifient.
La contemplation en est d’autant plus riche et étrange, visuellement hallucinante.