(c) Armin Smailovic

Si le théâtre, comme le rappelle Milo Rau, est ce dialogue avec les morts dont parle Heiner Müller, alors « Everywoman » en est la traduction la plus littérale, fruit d’un échange entre une correspondante en fin de vie, Helg Bedau, et Ursina Lardi. Le projet est une méditation sur la mort à la fois très ancrée dans le réel et, comme toujours chez Milo Rau, déployant un espace-temps scénique de fictionnalité ambiguë, notamment dans la part d’elle-même que la comédienne laisse entrevoir. Jouant sur le fil d’une émotion contenue qui était déjà la marque de « Compassion », Milo Rau entremêle, sans subterfuge ni esbroufe, des souvenirs documentaro-biographiques, appuyés par une scénographie vidéo, avec des réflexions sur l’ontologie tragique de nos destins mortels. Et lorsqu’Ursina Lardi s’assied au piano pour jouer l’adagio du BWV 564 de Bach par Busoni, le langage avoue sa défaite face à la plus incommensurable des indicibilités.