Dévorer un livre, aller au spectacle, voir un film… Qui n’aime pas se faire raconter une histoire ? Mieux : s’en raconter à soi-même ? On ne signe pas l’arrêt de mort de notre imagination en grandissant : on cultive différemment son « âme d’enfant ».
Cette « âme », Philippe Maymat la met au jour sous les yeux mêmes du spectateur. Il puise dans son passé – celui de fils cadet, entouré d’un frère et d’une sœur – pour dérouler tout un imaginaire d’enfant des années 1970. L’acteur fait s’entremêler récit autobiographique, événements de l’Histoire et digressions nées de ses fantasmes d’alors, pétris de références « pop ».
La pièce présente, avec finesse et tendresse, un moment clé de l’existence. C’est une vérité toute simple, un moment de vie qui nous est dévoilé ; celle où l’on grandit, où l’on apprend, où l’on se cherche, sans pour autant abandonner l’innocence consubstantielle à l’enfance. Il faut tout d’abord se laisser aller à cette impression étrange d’un « vieux » qui se présente d’emblée comme un jeune garçon ayant reçu une pièce de la petite souris. Une fois le pacte entre le spectateur et l’acteur accompli, Philippe Maymat nous entraîne avec beaucoup de conviction dans son univers qui, bien qu’émaillé de références très personnelles et datées, trouve en chaque spectateur un écho puissant.
L’univers musical, particulièrement soigné, facilite cette plongée dans ce monde réel et fantasmé. De multiples références – toujours pertinentes – à l’univers de cet enfant – chansons, dessins animés, séries et films d’alors… – ponctuent et accompagnent le discours scénique. Ainsi entouré, Philippe Maymat fait évoluer son récit dans une économie de moyens appréciable, qui convie l’imagination du spectateur à vagabonder librement.
Sans doute aucun, Philippe est un conteur. Dire sa propre histoire, c’est l’entremêler de souvenirs déformés, c’est composer avec les mensonges d’alors, avec la pensée d’un enfant mise en regard avec celle de l’adulte. C’est aussi raconter une autre histoire que la sienne : celle des héros qui fascinaient le petit Philippe, celle de contes, et de récits en vers. Réécrire son passé, c’est multiplier les histoires : construire une épopée, pour soi-même et pour les autres.
Voir « T’es pas né », c’est se demander à soi-même : est-ce que, moi aussi, j’ai grandi ?