Splendeur et misère des enfants des 80’s

Pourquoi Jessica a-t-elle quitté Brandon ?

(c) Lionel Devuyst

La scène se passe dans un Starbucks aux États-Unis, mais pourrait se passer n’importe où dans le monde, puisque n’importe où dans le monde on trouve des Starbucks. Jessica est face à Brandon, et prononce ces mots : « Brandon, ou bien tu me parles, ou bien je te quitte. » Brandon parle. Jessica le quitte quand même. Mais pourquoi Jessica a-t-elle quitté Brandon ?

C’est la question à laquelle tentent de répondre Emmanuel De Candido et Pierre Solot, et pour cela, ils vont remonter devant nous à l’avant Jessica et Brandon, car pour comprendre pourquoi Jessica a quitté Brandon, il faut d’abord comprendre qui est Brandon, en remontant jusqu’à son enfance, et peut-être même en remontant jusqu’à avant Brandon. Car Brandon, enfant des années 1980, est le pur produit de son époque. Solot, De Candido, et une partie de celles et ceux qui sont et seront dans la salle sont aussi des enfants des années 1980, des purs produits de leur époque, et c’est ainsi qu’ils, qu’elles, que nous frémirons de plaisir et de nostalgie devant les figurines Warhammer et la NES d’origine, avec un Duck Hunt qui fonctionne, s’il vous plaît. Mais « Pourquoi Jessica a-t-elle quitté Brandon ? » ne se contente pas de présenter un catalogue de souvenirs de la génération Y ; les deux comédiens-auteurs-metteurs en scène utilisent cet album de souvenirs pour dresser le portrait de cette génération. Portrait qui n’est pas toujours flatteur, tant s’en faut.

Brandon agit alors comme révélateur de toute sa génération, une génération d’hommes et de femmes qui, biberonnée aux images, à internet et au virtuel, finit par avoir des repères totalement brouillés. En évitant l’écueil classique qui consiste à rejeter sur les jeux vidéo et films violents la violence de masse, Emmanuel De Candido et Pierre Solot tissent un thriller numérique et multimédia qui montre comment, petit à petit, insidieusement, le virtuel peut brouiller la perception de la réalité de chacun·e. Un grand spectacle qui ne donne jamais de leçon tout en soulevant beaucoup de questions.