L’homme, cet animal inouï

Temporary Title, 2015

© Peter Greig

© Peter Greig

Vitres obstruées, moquette sombre, temps suspendu. Dans une cage semi-obscure, l’homme-lion traîne, nu et silencieux, sa silhouette féline et alanguie. Lentement, il marche, erre, à quatre pattes, le pas souple et chaloupé, en meute ou isolément. Un sentiment de douce inquiétude envahit le spectateur contemplant une étrange animalité se déployer au cours de subtils déplacements interrompus par des moments de soudain repos.

Pendant quatre demi-journées successives, Xavier Le Roy a investi le Centre Pompidou, où il avait déjà proposé une rétrospective en 2014 au cours de laquelle il « exposait » des danseurs qui revisitaient quelques-uns de ses emblématiques solos. L’intention de l’artiste est singulière dans la mesure où ce qu’il appelle « exposition » s’apparente bien à une œuvre vivante, performative, car animée par l’énergie organique d’un groupe de dix-huit interprètes qui se relaient et se meuvent dans un geste esthétique et chorégraphique évident. Il met en valeur la beauté et l’expressivité des corps offerts à la vue dans un dénuement radical.

Au mouvement s’adjoint la parole adressée très intimement à une personne de l’assistance avec qui un danseur va s’entretenir en retrait sur des questions futiles ou existentielles proposées à voix basse, et à qui il offre son écoute attentive. L’art, conceptuel, de Xavier Le Roy, ancien étudiant en biologie moléculaire, est d’observer les corps et les êtres, d’interroger le rapport à l’humain comme individu seul ou en groupe, et de mettre en scène performeurs et spectateurs comme une communauté communicante. De toute beauté, « Temporary Title, 2015 » est une proposition déconcertante, fauve mais pas si sauvage.