© Christophe Raynaud de Lage

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Les “Contes immoraux“ ont visiblement marqué une inflexion tenace dans le travail de Phia Ménard. Ses gestes scéniques tendus comme des symboles plurivoques, mais valant aussi bien comme purs actes performatifs (« Vortex », « Saison sèche »….), ont laissé place à des formes sollicitant le temps de la représentation comme fileur de métaphores sans ombres. Ici celle d’un enfant, à la fois archi-référencé et indéterminé par ses masques gigognes, qui exfolie un jardin à la française – espace strié par excellence – et déboulonne une statue commandante. Celle-ci lui lâche sa hache et s’en trouve bien sûr déplâtrée. Les graviers graphiques sont quant à eux dégoncés tandis que les débris composent un sentier de traverse propice au cloche-pied. Si “Art. 13” entend montrer une insurrection minuscule, une tentative d’habiter fort rapidement écrasée par un colosse aux plus gros pieds d’argile, il détrompe sa tentative chaplinesque par un balisage trop lisible du parcours de sa figure. Aussi bien par les événements provoqués, rarement imprévisibles, que par le gestus très signifiant qui aurait dû, dans sa recherche rare d’héroï-tragi-comique, être bien plus inouï. Il est louable d’avoir rêvé ce spectacle comme bien autre chose qu’une métaphore critique – la copieuse note d’intention de Camille Louis fournie dans la bible, qui semble valoir comme cartel exégétique, s’étend là-dessus. Sauf que le démon de l’allégorie (statue oblige) s’est bien emparé pour nous d’« Art. 13 » : l’expérience du sens que nous avons faite a été condamnée par la prévision des signes et par leur statisme conséquent. L’intention de Phia Ménard est peut-être  de regagner l’efficace des grands symboles déchiffrables et populaires que vantait voilà un siècle Edward Gordon Craig, de rendre une urgence au théâtre d’images, de ne plus séparer l’art de l’article, mais c’est au risque d’une œuvre trop digérable pour être aussi virale qu’elle le voudrait.