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Sans répétition et à partir de quelques règles de jeu simples, Robin Lescouët démarre son périple, aveuglé d’une cagoule noire, portant casque et protection dorsale pour éviter les éclats de verre éventuels, travaillant à genoux dans un silence ponctué d’un gong qui souligne le suspens grandissant. Des boules de gomme noires attachées à un fil rouge sont lancées au travers de la pièce, qu’il s’applique à suivre lentement, à quatre pattes, encore et encore. Simultanément, sa comparse monte ici et là des sculptures d’objets en verre verticales et instables. Les lancers de gomme et les passages agenouillés à travers un espace qui s’encombre régulièrement, deviennent par conséquent, de plus en plus risqués. Pris dans une montée en puissance qui ne met personne véritablement en danger mais nous place métaphoriquement au bord d’un précipice, on reste suspendu à leurs gestes. Par de petites actions répétitives, la lenteur est rendue aussi trépidante que l’action la plus intense et les perceptions du public en sortent démultipliées (en vaut pour preuve les exclamations qui fusent, de plus en plus sonores). Il y a un génie du propos de ce presque rien qui, même s’il n’est pas nouveau, fonctionne parfaitement. Les deux performeurs rendent visible à peu de frais l’esthétique de l’échec, le droit à l’erreur, la beauté du geste aveugle, le hasard qui pétrit nos vies. Et rendent au temps sa lenteur.