Créé pour le festival Montpellier Danse en 2013, « Dumy Moyi » (titre qui signifie « mes pensées » en russe) s’inspire des rituels de theyyam dans le Malabar indien. Que l’on découvre cette performance dans une grotte ou dans une chapelle, dans un château au coin d’une cheminée ou dans le foyer des danseurs du CND, ce solo reste une expérience à part pour le spectateur. Pendant 45 minutes, François Chaignaud se veut chaman de lumière.
Les spectateurs sont assis sur des sièges bas et gonflés, en deux rangées qui se font face. Plongés dans une demi-pénombre, ils semblent réunis autour d’un feu de camp, dans l’attente d’une réunion nébuleuse. François Chaignaud apparaît dans le fond, paré de coiffes faites de plumes et de sequins et d’un costume aux somptueuses ampleurs, nuances et matières. Le visage pailleté et fardé, la mystérieuse créature s’avance. Personnage à la fois inquiétant et magnétique, elle nous surplombe tous et nous frôle, créant une scène mystique durant laquelle une apparition divine descendrait à la rencontre de son peuple. Comme un serpent mue, elle change de parure dans cette atmosphère à la fois sauvage et religieuse. L’espace se remplit de chants envoûtants, d’abord murmurés et qui gagnent en ampleur, tantôt graves, tantôt en mode haute-contre, participant à ce rituel qui évoque de multiples contrées. Comme François Chaignaud le désire, les rituels du théâtre occidental s’estompent, remplacés par une sensation de proximité aspirante et de méfiance, deux sentiments intrinsèquement liés pendant toute la performance.