J’étais dans mon Parthénon et j’attendais que la pluie vienne

Contes immoraux - Partie 1 : Maison mère

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La “guerrillère” bricoleuse tend des bâtons noirs pour se faire battre ou aduler. Sa « Maison mère » transporte les uns et ne laisse aux autres que des rires gênés. Maquettiste laborieuse ou prêtresse d’une épopée performative sur l’Europe d’aujourd’hui, Phia Ménard fait a priori le choix de la radicalité pour honorer l’épithète des « contes immoraux » (dont elle signe ici le premier volet). Nous assistons pendant une heure et demi au scotchage et tronçonnage d’un Parthénon de carton, avant qu’un déluge irrémédiable et très métaphorique noie le périlleux labeur dans la tragédie du dérisoire. Si le geste questionne esthétiquement et éthiquement, c’est par son rattachement au processus performatif. En quoi ce carton prédécoupé très fabulateur laisse-t-il advenir le présent ? En quoi l’image insistante qu’il nous laisse finalement sert-elle autre chose que la prédiction métaphorique de l’œuvre ? Pourquoi cette frontalité nous est-elle imposée, empêchant tout dissensus et toute architecture collective ? Cette « maison mère » serait l’image lente d’un « village Marshall » qui « s’effondre malgré l’énergie déployée pour le sauver », comme le dévoile explicitement sa note d’intention. Le temps des allégories semblait révolu sur la scène contemporaine, car leur déploiement linéaire et leurs signaux didactiques sont incompatibles avec l’éclat performatif. Phia Ménard le ranime malgré elle, son protocole donnant lieu à de trop rares événements. Là où sa proposition reste malgré tout très politique, en dépit des discours qu’elle anticipe visuellement, c’est par cette temporalité dramatique qu’elle réussit à imposer : le temps linéaire et salvateur de l’édification, où la décision héroïque est de nouveau permise. Ce temps où les cartons informes peuvent devenir de solides pierres d’attente.